6 janvier 2010

Un châle

"Je" est un autre... juste pour prévenir. J'aime simplement écrire comme ça.
Par contre j'en connais un qui va encore dire que je ne fais que parler chiffons...


*

Le facteur m'a fait une belle surprise ce matin. Il avait un colis pour moi. J'étais étonnée, je n'avais rien commandé, je n'attendais rien.

Ton paquet m'a fait très plaisir en même temps qu'il m'a intriguée. Que pouvais-tu bien m'avoir envoyé, en quel honneur, et surtout, qu'est-ce que ça pouvait bien être pour être aussi léger?
Tu imagines que j'ai réglé au plus vite les formalités avec le facteur. Je pense que jamais je n'ai fait une signature aussi illisible. Mais tant pis.

Par souci d'ordre (et probablement par masochisme aussi), j'ai tenu à ouvrir le carton correctement. Chercher les ouvertures, enlever tout le papier collant que tu avais mis autour, pour être sûre que personne ne l'ouvre en chemin... En même temps tu as raison, ils ne se gênent parfois pas de vérifier le contenu des paquets donc. En tout cas, je t'affirme que tu es très douée pour faire des emballages résistants.

Tu aurais dû voir ma tête quand j'ai découvert le châle. Je ne m'y attendais absolument pas, c'était une surprise totale.
Mais aussi, comment aurais-je pu deviner que rien qu'en t'ayant complimenté sur ton beau châle la dernière fois que nous nous sommes vues, tu allais décider de m'en crocheter un? Je sais le temps que ça te prend !
Et la couleur ! Tu me connais vraiment bien, framboise, c'était exactement ce qu'il me fallait ! Je l'ai directement mis d'ailleurs, il est si doux et si chaud.

Il fallait absolument que je te remercie immédiatement. J'ai donc directement attrapé mon téléphone et composé ton numéro.
Lorsque plus tard j'ai raccroché, j'étais beaucoup moins joyeuse. Tu venais d'avoir les résultats de l'hôpital pour tes yeux. C'est inopérable, d'ici quelques mois, tu seras aveugle. Ça m'a fait un choc.
Je regarde le châle, en pensant qu'il sera peut-être le dernier que tu auras pu faire. C'est idiot de penser à ça, mais c'est la seule manière dont j'arrive à me formuler la dure nouvelle que tu viens de m'annoncer.

Et surtout, je regarde les choses, les paysages, différemment maintenant. Comme ce soleil qui commence à se coucher. Le ciel est légèrement rosé, ça se mélange au bleu, c'est étrange. Et magnifique. Je m'imagine te le décrire. C'est ce que je ferai sous peu, je vais m'installer chez toi. Je te ferai aussi la lecture, tu aimes tant lire...

3 janvier 2010

Les boutons

Texte faisant partie de ma participation au Casse-tête du forum Place des Mots.

Texte libre... ou presque : rédiger un texte commençant par la phrase:" Et ce bouton, il sert à quoi ?"

J'ai un peu pété les plombs, pour changer...


*

- Et ce bouton, il sert à quoi ?
- Ah, celui-là, ça s'appelle un bouton de manchette. Les hommes portaient ça aux poignets de leurs chemises. C'était des vêtements pour le haut du corps, attends, je dois avoir un croquis quelque part...

Quel plaisir pour Alikéa de garder sa petite nièce pour l'après-midi. Cette dernière était curieuse de tout, et la collection de boutons de sa tante l'avait de suite captivée. Il faut dire qu'elle était impressionnante. Elle avait rangé son grenier en une sorte d'exposition de boutons. Et elle en avait de toutes les sortes, de toutes les époques... le travail de plusieurs dizaines d'années.

Les heures filaient imperceptiblement, la petite demandant des explications sur chaque nouveau bouton, comment il était porté.
Elle avait été fascinée par les boutons en nacre, de la même utilité que les normaux d'à côté, mais tellement plus jolis !

Les boutons d'acné l'avaient répugnée par contre. Quelle horreur ! Comment les "ados" de la préhistoire osaient-ils porter ça sur leur visage ? C'était tellement inesthétique !

Les boutons des machines de la même époque étaient étranges aussi. Un pour chaque fonction, incapables de fonctionner par télépathie. Comme c'était étrange !
Et ceux qui étaient placardés aux murs, assez moches par ailleurs, pour faire venir la lumière aussi...

Après avoir passé aussi les boutons des plantes, sans oublier les magnifiques "Boutons d'or" dont elle ne comprenait toujours pas le nom, la fillette fut attirée par une boîte étrange un peu à l'écart des autres. En soulevant le couvercle, elle vit un énorme bouton qui occupait toute la caisse.

- Et celui-là tati?

- Ah, celui-là, c'est une pièce unique. J'ai mis du temps à le trouver, tu peux me croire. C'est ce que les dirigeants appelaient le "bouton rouge". Un truc qui faisait peur à tout le monde. Apparemment, en appuyant dessus, ils pouvaient détruire l'humanité d'un coup, juste comme ça.

- Mais c'est pas possible ça !

- Je sais ma chérie, mais que veux-tu, ils y croyaient eux. Et ça leur faisait très peur.

- Et tu penses que ça ferait quoi si j'appuyais sur le bouton ?

- Rien sans doute. La vague menace que ça devait représenter n'existe plus, c'est beaucoup trop vieux. Vas-y si tu veux...

Et c'est comme ça que la race humaine disparut...