13 février 2012

Combustibles

Il fallait écrire sur le thème de la culpabilité, en insérant cette phrase : "Elle serra de plus belle le livre contre elle comme pour le protéger."

*

Recroquevillée dans un coin, tête basse, beaucoup passaient près d'elle sans la voir tellement elle se fondait dans le décor, vêtements sales et cheveux sombres et emmêlés sur fond de béton.

Elle savait pourtant qu'elle ne pourrait pas rester là indéfiniment. Il allait lui falloir bouger, ne fût-ce que parce que ses jambes s'ankylosaient et qu'elle commençait à ne plus sentir ses pieds transis de froid.

Mais elle ne pouvait se résoudre à bouger. Chaque instant, elle croyait voir l'étoffe d'un uniforme et se tassait encore plus, craignant plus que tout d'être remarquée, embarquée, interrogée, enfermée. Quoiqu'elle serait probablement plus à l'abri au poste que dans ces rues glaciales, où la plupart des gens ne faisaient que passer, rapidement, chaudement emmitouflés avant de regagner leur demeure où un feu et un repas chaud les attendaient certainement.

Devait-elle se dénoncer?

Son cœur battait si fort contre sa poitrine qu'il en était douloureux. Elle était gelée.

Au même rythme que son cœur, un mot martelait ses pensées, inlassablement. Elle en devenait folle.

Matricide.

Elle n'avait pas le droit d'aller se dénoncer. La peine serait trop clémente. Elle serait à l'abri du froid et de la faim dans une cellule. Elle méritait la même peine qu'elle avait infligée à sa propre mère. Ils ne pouvaient pas, ne devaient pas la trouver.
Ils n'allaient pas tarder à découvrir le corps congelé de sa mère, quelques rues plus loin.

Son regard était dirigé sur le livre qu'elle tenait sur sa poitrine, les yeux baignés de larmes. Seule pièce à conviction de son acte ignoble. Elle ne maîtrisait plus les tremblements qui secouaient son corps frêle. Elle se sentait partir.

Une main se posa sur son épaule. Elle serra de plus belle le livre contre elle comme pour le protéger. Un mouvement instinctif. On lui parlait, mais elle ne bougeait pas. Elle ne pouvait plus. Son corps refusait d'obéir.

Elle sentit qu'on avait posé une couverture sur ses épaules, qu'on la transportait. Elle ne sentait plus rien, était comme hors de son corps... Jamais elle ne lâcha le livre... Ni ne sécha ses pleurs, même inconsciente.

À l'hôpital, où on s'occupa d'elle, l'infirmière la plus patiente, celle qui prit le temps d'écouter les mots murmurés entre deux sanglots, éprouva de la compassion pour cette fille de 14 ans, mise à la rue avec sa mère, et qui se sentait coupable de la mort de cette dernière, pour avoir refusé de brûler le dernier livre qu'il leur restait, son seul trésor. Un livre pour une vie.
Et elle se mit à parler à l'enfant inconsciente et délirante, lui assurant qu'un livre n'aurait probablement rien changé à la situation. Espérant que, la conscience apaisée, son corps accepterait de se rétablir...

18 janvier 2012

Tapis de fleurs et XVIIIe s.

Ca fait un bail que je ne vous avais pas proposé de photos. OK, mon appareil est mourant (il tient trois photos avant que la batterie lâche ! super non?), mais j'ai encore des photos en stock que j'avais oublié de vous montrer...

Donc, il y a un château que j'aime beaucoup dans ma région. Le parc est toujours accessible, et est magnifique (j'aime aller m'y promener), et le château abrite de très belles expositions.
Et en été, durant trois jours, il y a le tapis de fleurs. La cour du château est remplie de fleurs formant une fresque.

Vu qu'il fallait quand même rentrer dans le château (on voit encore mieux les fleurs depuis l'étage), on a visité l'exposition XVIIIe siècle au passage ("Faste et intimité").

Le tapis de fleurs :


Le château est célèbre pour un détail très particulier : ses parquets. Ils sont tous d'époque (d'ailleurs, port de chaussons obligatoire dans le château, j'vous dis pas l'allure...)




Comme l'expo était centrée XVIIIe, il y avait même un salon de thé à l'ancienne... on en a profité (les serveuses étaient en costume d'époque !) :


Quelques photos de l'expo en elle-même (j'ai surtout canardé ce qui m'intéressait, bouchez-vous les oreilles, l'Elfe va hurler je pense... et oui, ils sont authentiques...) :






Une photo du parc :


Voilà !
J'avais pas mal de photos, j'ai dû faire un tri...

17 janvier 2012

Blanche rencontre

Un embouteillage routier devait jouer un rôle important dans le texte...

*

Prenez quelques semaines de froid polaire glaçant le sol et un réchauffement soudain permettant la tombée d'une neige fondante un après-midi à 15 heures, juste avant que les gens ne quittent leur travail.
Il était 17h30, et plus rien ne bougeait. Les températures étaient à nouveau descendues, la neige tenait maintenant, mais elle ne faisait que masquer le verglas qui s'était installé sur les routes.

Des policiers passaient relayer l'information que la radio ne pouvait plus, la tempête empêchant les transmissions. Un camion avait glissé et s'était couché sur le flanc en travers de l'autoroute. Impossibilité totale de passer.

Victor tentait vainement de passer le temps en observant ses voisins d'infortune. À sa gauche, apparemment un haut gradé, à en juger par la voiture de sport, le costume chic et la cravate encore impeccablement nouée en fin de journée. Cela ne l'empêchait pas de tenter de se... gratter le cerveau probablement, à en juger par la profondeur de... Ne souhaitant pas connaître la suite des expéditions spéléo-nasales de Costume-cravate, il tenta un regard sur la droite.

Lorsque sa vision des couleurs fut rétablie, il put découvrir l'origine du choc visuel qu'il venait de recevoir. Un vert pareil, sur une voiture, ce n'était pas banal. Il n'aurait pas été étonné qu'on lui annonce que la voiture était phosphorescente.
À son volant, une jeune femme, cheveux courts en bataille et souriante. Originale, à n'en pas douter. Elle et sa voiture allaient bien ensemble.

Elle ne semblait pas prêter attention au trafic et au chaos ambiant, ni au froid, toute emmitouflée dans une espèce de cape de laine, occupée à ... tricoter?

Il se frotta les mains, il commençait à ne plus les sentir.

C'est là qu'il vit qu'elle l'avait remarqué. Elle lui proposa du thé de son thermos, et il l'invita dans sa voiture. Elle monta, non sans être accompagnée de son sac à ouvrage. C'était du crochet apparemment, une étole chaude pour affronter le froid. Ils parlèrent un moment, elle crochetant et lui l'observant, jusqu'à ce qu'il se mette à frissonner à nouveau.

Emilie - elle lui avait dit son nom - lui proposa de repasser dans sa voiture, elle y avait tout ce qu'il fallait. Il put s'en rendre compte lorsqu'il vit le contenu de la voiture. Elle alla dans le coffre et revint avec un pull supplémentaire pour elle, ce qui lui permit d'utiliser son manteau comme couverture, et une très longue écharpe rayée, qu'elle lui proposa ainsi que la couverture qui se trouvait sur la banquette arrière. Du chocolat et une tasse de thé plus tard, il avait oublié jusqu'au fait qu'il était dans une voiture. Il remarqua un livre entre leurs deux sièges et s'intéressa au titre. Elle lui proposa de le prendre s'il voulait s'occuper.

Ils passèrent comme ça une bonne partie de la nuit, parlèrent longuement et s'endormirent tard. Lorsque le matin, le concert de klaxons leur indiqua que la route allait bientôt se libérer, il eut un pincement au cœur à l'idée de quitter cette jeune femme.

Toujours souriante, elle lui proposa de garder son roman, en souvenir.

Lorsqu'il fut rentré, il regarda le livre qu'elle lui avait laissé. Sur la première page figuraient son adresse et numéro…

9 janvier 2012

An 2695

Thème : écrire un texte dont l'idée générale est le changement (transformation, métamorphose, bouleversement...). Le texte devait comporter impérativement au moins trois des quatre éléments suivants : un prénom, une ville, un pays, une fleur.

*

#21 985
Je suis allé au marché aujourd'hui. C'est de plus en plus difficile de trouver des légumes. Ou alors ils sont tellement bourrés de pesticides qu'ils sont encore fumants d'acide et complètement blets... peu appétissant.
J'ai hâte que mon potager se développe.

#21 986
Il me semble voir que mes carottes poussent, lentement mais sûrement.

J'ai croisé Marguerite aujourd'hui. Ou était-ce Rose ? J'ai du mal à les reconnaître. Bizarre, on se connaît depuis toujours pourtant avec leurs frères... Elle voulait m'inviter chez eux, ça fait longtemps que je ne me suis plus retrouvé avec leur famille. Mais ils ne mangent plus que de la viande et des compléments. Je refuse d'avaler ces compléments, les légumes suffisent normalement !

#21 987
Mon voisin m'a regardé étrangement ce matin. J'espère qu'il ne songe pas à me dénoncer pour mon potager.

#21 988
Rencontré Garance. Apparemment, et Marguerite et Rose sont parties sur Barcelone. C'est Iris que j'ai croisée. Depuis quand ces sœurs se ressemblent-elles tant ? Il me semble pourtant que lorsqu'on était plus jeunes, c'était le jour et la nuit entre elles... que m'arrive-t-il ?

#21 989
On est venu saccager mon jardin cette nuit ! Fini les légumes !
Je suis sûr que mon voisin est dans le coup, je l'ai vu qui s'enfuyait. Heureux d'aider les forces de l'ordre je parie. Collabo...

#21 990
Mon voisin est à l'hôpital depuis deux jours...

#21 991
Je commence à m'inquiéter. Je regarde un peu mieux les gens dans la rue, ils se ressemblent tous ! Tous des hommes pareils et des femmes pareilles. Comment personne ne s'en est rendu compte jusqu'à présent ?
Ça a dû changer petit à petit...

#21 992
Plus possible de sortir en rue. On me moque parce que je ne ressemble pas aux autres hommes... fatalement, les yeux verts, c'est honteux maintenant.

#21 993
J'ai reçu une sommation. Je dois prendre mes compléments alimentaires, comme tout le monde, si je ne veux pas avoir de problèmes...
Je refuse !

#21 994
Après les sommations, ça a été les coups. Ils ont tenté de me forcer à en avaler, j'ai résisté. Il faut que je fuie avant qu'ils ne reviennent, je...