23 juillet 2009

Feu mon mari

Jeu d'écriture.
Thème : la rencontre (qui pourra être insolite, amoureuse, du 3ème type, etc)
Inclure les mots : douleur, sommet, portrait, sévère, hanter.


*

"J'avais froid."
Voilà la seule explication qu'elle m'avait fournie. Et elle ne semblait pas capable de m'en fournir une plus logique, ou à défaut plus complète. Sa seule réponse à mes questions, si sévères soient-elles, restait inchangée. "J'avais froid".

Elle, restait là, serrant la couverture que je lui avais donnée contre elle, à contempler les flammes qui dévoraient sa maison. Elle fixait ce spectacle d'horreur avec un détachement effrayant, comme on contemplerait un portrait au musée. J'en avais vu avec les années, des personnes qui avaient vu leur demeure partir en fumée. Une vision qui hantait parfois pendant des années...
Mais cette femme m'intriguait. Elle n'avait absolument aucune réaction, pas le moindre cri de douleur, pas la moindre larme, pas le moindre mouvement esquissé vers sa maison pour tenter d'en sauver quelque chose. Rien. Elle restait aussi immobile qu'une statue, fixant le brasier.
Il me fallait pourtant l'interroger.

- Vous vivez seule ici ? Vous avez un mari ? Où se trouve-t-il ?
J'étais nerveux, je posais toutes les questions à la fois sans lui laisser le temps de me donner une réponse, qui fut particulièrement laconique.
- Il est mort...
Ton neutre. Elle me fit frissonner.
Pourtant mon sentiment de malaise face à cette femme atteignit des sommets lorsque mon adjoint vint me trouver. Le feu venait d'être maîtrisé.

- Monsieur, on a retrouvé les restes d'un corps carbonisé parmi les décombres.
Déglutissant avec peine, je me retournai vers elle, toujours aussi statique. Les ruines fumantes de sa petite bicoque donnaient l'impression d'être captivantes à ses yeux. Elle était toujours aussi réactive que la femme de Lot après transformation en statue de sel...

Finalement, elle ouvrit la bouche pour prononcer plus de trois mots.

- J'avais froid. Très froid. Plus de bois. Je me suis dit qu'avec tout l'alcool qu'il avait encore avalé, il ferait un bon feu...

Je m'en souviendrai de cet incendie...

*

La réponse à la question que tout le monde se pose : pourquoi j'ai choisi un titre qui gâche le texte et dévoile l'histoire? Simplement parce que je ne l'ai pas remarqué... mais genre absolument pas... j'ai honte...

Aucun commentaire: