10 novembre 2008

Prémonition

Texte-défouloir... tout simplement.

*

Tout avait commencé en fin d'après-midi. Une sombre impression que quelque chose n'allait pas. Habituellement, elle réussissait à chasser ces mauvaises pensées, mais là, pas moyen.

Il faut dire aussi que rien n'allait vraiment bien ces derniers jours! Mais selon vous, c'est facile d'abandonner comme ça son rêve, le rêve de toute une vie? Surtout dans ces conditions. Elle n'avait pas eu le choix. Enfin, soyons optimiste, il lui restait une dernière chance, un rendez-vous pour le lendemain. Ce maigre espoir lui donnait encore le sourire. Si elle parvenait à convaincre demain, il lui restait une chance! Oh, ce serait loin d'être facile, 4h de trajet supplémentaire par jour. Mais elle y arriverait oui!

Alors… à quoi était dû ce malaise? Elle n'arrivait pas à le définir. Cette inquiétude sourde s'insinuait en elle, telle un serpent prêt à étouffer sa proie. Elle n'arrivait à se concentrer sur rien, pas même le livre qu'elle avait eu tant de mal à quitter tout à l'heure, c'est dire!
On l'appelle en bas. Elle réagit instantanément, chose rare également. Que se passe-t-il?

- On part chez papy et mamy, préviens ton frère et ta sœur. Ne nous attendez pas.

La réponse fut immédiate.

- Je viens avec vous!
- Non, ça ne servira à rien. Il faut que tu te reposes pour demain.

Elle n'arriva pas à les convaincre. Pourquoi cet empressement? Simplement, le sentiment de malaise s'était renforcé. A ce moment, elle eut la certitude que quelque chose n'allait pas. Elle n'eut d'autre choix que de rester.

Commença alors l'attente, longue, inquiétante.
Dormir? Impossible! Tant qu'elle ne saurait pas de quoi il en retourne. Une petite voix en elle lui disait : "et quand tu sauras, tu pourras dormir tu penses?"
Oui, là, bien cachée, une partie d'elle savait ce qui se passait, ou tout du moins s'en doutait. Mais le reste de son esprit n'était pas prêt à admettre l'impensable.

Et le silence, le silence qui enveloppait la maison, coupait tous les bruits environnants. Etait-ce juste une impression?
Le téléphone sonna. Fébrile, elle attrapa le téléphone, qui faillit lui glisser des mains.
Les parents. Que se passe-t-il, dites-moi! Pas de réponse.
Ils avaient besoin d'un numéro de téléphone. Elle répondit, sans chercher à comprendre le pourquoi. Elle ne réfléchissait plus, ses réactions étaient comme ralenties.

Recommence l'attente, l'angoisse.
Bien des heures plus tard – quelle heure était-il d'abord? elle avait perdu la notion de temps – un bruit se fit entendre. Le retour! Enfin elle aura une réponse à ses questions. Le suspense allait prendre fin. Elle dévala les escaliers. Ils furent surpris de la voir encore éveillée. Ah tiens, 3h du matin, en effet, compréhensible…

- Vous allez enfin me dire ce qui se passe?

Elle était fatiguée, énervée. Un flot de sentiments se bousculaient en elle, de la crainte à la colère. Allait-on enfin lui dire?

- C'est papy…

Maman avait les larmes aux yeux. Pas besoin d'en dire plus. Elle ne sentait plus ses jambes, s'assit sur les marches qu'elle venait de descendre. Elle ne réalisait pas vraiment, pas encore. De la marée sentimentale de l'instant d'avant ne subsistait plus rien, qu'un grand vide. Et cette petite voix qui lui disait "je le savais", mais qui était loin de s'en réjouir.
Elle ne put retenir ses questions.

- Comment? Pourquoi?

Maman éclata en sanglots. Papa se chargea de lui expliquer. Il était pâle. Elle ne les avait jamais vus comme ça. Eux, si forts, étaient complètement abattus.

Il ne servait à rien de rester là. Vu l'heure, chacun alla se coucher. Elle remonta, mais ne parvint pas à dormir. Ni à éteindre la lumière non plus. Pourquoi avoir demandé le comment? Des images apparaissaient devant elle. Elle n'osait plus fermer les yeux.

Les jours suivants se passèrent comme hors du temps.
Le lendemain, son dernier espoir de voir son rêve s'accomplir se brisa. Cela ne lui fit rien. Rien ne la faisait réagir.
Elle voyait les autres pleurer tandis qu'elle avait les yeux secs.

Quelques jours passèrent comme ça, sans dormir, se forçant pour s'alimenter un minimum. Ca dura jusqu'au jour de l'enterrement.
Là, devant le cercueil, elle sembla enfin réaliser tout ce qui s'était passé. Quelqu'un vint la voir, la prit dans ses bras. Et là, la marée revint… haute. Elle se mit à sangloter, doucement d'abord, puis de plus en plus violemment. Les larmes coulaient sur ses joues, mouillaient ses vêtements et les bras protecteurs. Toutes ces larmes qui ne voulaient pas venir durant ces 3 derniers jours furent versées en quelques heures. Elle pleura longuement, réalisant enfin tout ce que cette pendaison signifiait.

Plus jamais elle ne reverrait papy…

1 commentaire:

Yunette a dit…

Je pense que ça se passe de commentaire...

(note que j'en fais un pour dire ça...)